L'Ile de Madère

Séjour à Madère, par les touristes en vadrouille


Du 23 Septembre au 8 Octobre.
Pascale

Comme le dit un prospectus, Madère est un tableau peint par les Dieux. Bon c'est peut-être un peu fort, mais c'est en tous cas une île qui mérite vraiment que l'on s'y attarde et nous avons pris beaucoup de plaisir à la visiter. Comme on a bien lu les prospectus, voilà un petit résumé culturel :

Histoire
Madère, a été officiellement découverte en 1419 par 2 navigateurs portugais qui émerveillés par la beauté de sa forêt dense et luxuriante, l'appelèrent "ilha de Madeira", l'île du bois, en portugais. La colonisation de l'île a attiré de nombreux pionniers de nationalités différentes (Hollandais, Allemands, Français, Espagnols et Anglais), ce qui en fît une île attirante, cosmopolite, qui se développa rapidement malgré une série d'épidémies et d'attaques de pirates ... Français qui rasèrent la moitié de la capitale Funchal en 1566. L'île a été rapidement connue pour son vin, sa canne à sucre et ses broderies d'une beauté remarquable. Madère est aujourd'hui une région autonome du Portugal, qui vit essentiellement du tourisme, tout en continuant de développer la culture de la vigne, de la banane, et autres fruits et légumes exotiques qui ont su s'acclimater à Madère aussi bien que dans leur propre milieu naturel.

Végétation
L 'archipel de Madère fait partie de la région bio-géographique de la Macaronésie qui regroupe les îles atlantiques des Açores, de Madère et des Canaries. Madère mesure 57km de long sur 22km de large. C'est une île volcanique, à la végétation exubérante, et au relief très escarpé. Elle possède un patrimoine naturel du plus haut intérêt scientifique, qui a été inclus par l'Unesco sur la liste du Patrimoine Naturel Mondial: la forêt primaire de Madère, La Laurissilva, qui remonte à l'ère tertiaire de la terre. Madère est pratiquement un réserve naturelle, deux tiers du territoire sont protégés. L' île est jalonnée de sentiers et de "levadas", étroits canaux d'irrigation construits par les premiers habitants pour récupérer l'eau des montagnes. C'est aussi le paradis des marcheurs.

Faune
Madère est peuplée d'espèces rares d'oiseaux tel le pétrel de Madère ou encore le pigeon trocaz. C' est également une réserve marine naturelle notamment les Îles Désertes à quelques miles de Madère, et les Îles Salvagem, perdues entre Madère et les Canaries. Après avoir autorisé pendant 40 ans, la chasse au cachalot (5 885 tués jusqu'en 1981), la protection des baleines et autres mammifères marins est maintenant une priorité dans les eaux territoriales de l'île.


Nous appareillons le 23 Septembre de Porto Santo pour une courte traversée de six heures au moteur. Sachant que le port de Funchal, la capitale est toujours complet voire surchargé, et que les mouillages autour de l'île sont peu nombreux et incertains, nous avons réservé une place dans le port de Quinta Do Lorde nouvellement construit et se trouvant à 35km à l'est de la capitale. La bonne nouvelle c'est que le catamaran y est en sécurité, les mauvaises sont que la marina est chère, tristounette, loin de tout, la ville la plus proche Caniçal est à 3/4 d'heure à pied, il y a 3 bus par jour à des horaires impossibles, le premier supermarché est à 1/2 heure en voiture,... on comprend pourquoi le port est quasiment vide. Mais bon, on était prévenu et dès le lendemain nous louons une voiture pour la semaine, de façon à profiter pleinement de notre séjour à Madère.

La marina de Quinta Do Lorde

 Notre première visite est le musée de la baleine à Caniçal, d'où nous ressortons tout retournés par le reportage en français que nous visionnons sur la chasse à la baleine, qui permit d'exterminer une bonne partie de la population de cachalots en seulement 40 ans, dans la région. Le cachalot était principalement chassé pour sa graisse transformée en huile d'excellente qualité, et utilisée dans l'aéronautique, la cosmétologie, et la parfumerie. Son commerce est interdit depuis 1981 seulement,et l'ensemble des mammifères marins est vraiment protégé depuis 1994 dans cette région. Il était temps!
Autre exemple assez éloquent: la baleine bleue, il y en avait 250 000 en 1920 et 500 recensées en 1994. Ce n'est pas étonnant que l'on ait du mal à en voir maintenant...

Le lendemain, nous partons en expédition visiter la capitale, Funchal. Après avoir été chercher nos prospectus au centre d'information, nous avons été voir le port, et sa marina surchargée. Effectivement, on n'y rentrerait même pas... et le mouillage a l'air assez inconfortable. C'est une ville très fleurie et très agréable avec des marchands de fruits au coin des rues. Nous allons jusqu'aux halles qui regroupent le marché aux poissons, celui des fruits et légumes et enfin le marché aux fleurs.    

Le marché aux poissons, est intéressant, mais il faut aimer l'odeur du poisson! Le poissons les plus courants sont l'espada, poisson épée, mais que nous trouvons un peu fade, le thon, la bonite, le maquereau, et le poisson perroquet qui est excellent. On a même vu de la murène et de l'espadon.
Au marché aux fruits, nous y serions restés des heures à tout regarder, tout goûter... Car évidemment, les marchands nous ont fait goûté presque tous les fruits exotiques que nous ne connaissions pas: l'anona ou pomme cannelle à plus ou moins 20€ le kilo car ce n'est pas la saison, le fruit du philodendron dont l'écorce tombe d'elle-même par petits morceaux quand il est mûr et qui se mange en 2 ou 3 jours, la banane d'argent qui est petite, très sucrée et luxueuse car 4,5€ le kilo, la mangue, les différentes sortes de fruits de la passion (maracujas) en forme de banane, tomate,... et même des bâtonnets de canne à sucre à sucer comme de la réglisse. Et comme nous sommes gourmands, la note a été plutôt ... salée. Les légumes nouveaux pour nous, sont la patate douce, excellente, elle a un goût de châtaigne, et la christophine également appelée chayotte ou chouchou, que j'ai cuisiné à partir de très bonnes recettes données par des navigatrices rencontrées à Madére.


Le lendemain nous partons avec le pique-nique nous promener le long d'une levada. Il fait beau et le chemin est abrité sous les arbres. Il y a des fougères, des fleurs sauvages, c'est magnifique. Ici c'est le paradis des fleurs, il y a des hortensias sauvages le long des routes, des amaryllis, des strelitzia, ... même si la saison de la floraison est déjà bien avancée, en fait il faudrait y être au début de l'été. Nous terminons la journée par la montée à travers les nuages d'un des plus hauts sommets de l'île, le Pico de Arieiro, à 1818 mètres. Comme partout sur Madère, les paysages sont spectaculaires et saisissants.

Le Carnet de Romain

Une promenade forestière

Le vendredi 26 septembre, dans l'est de l'île de Madère, nous sommes allés faire une petite ballade en forêt. Nous marchions le long d'un petit sentier qui suivait une levada. C'était une jolie promenade. De temps en temps, nous croisions des cascades qui alimentaient la levada. A un moment nous avons vu une grotte de l'autre côté de la levada. Nous sommes entrés et nous avons marché jusqu'à un croisement, et là, nous avons rebroussé chemin. Et puis la levada était pleine de poissons (truites). A propos de poissons, nous nous sommes bien amusés avec eux, car au fur et à mesure que nous avancions, nous les délogions grâce à un bâton trouvé sur le chemin. Parfois nous traversions des ponts de pierre très étroits. C'était très rigolo. Finalement nous nous sommes arrêtés pour manger et boire et avons fait des barrages dans la levada pour nous amuser. Et puis nous sommes rentrés à la voiture. Sur le chemin, nous avons délogé une truite d'au moins vingt centimètres de long, quatre centimètres de large, et cinq centimètres de haut. La levada devait faire trente centimètres de large et contenait cinq à six centimètres d'eau (hauteur). Et puis j'ai vu passer à côté du chemin une bête qui ressemblait beaucoup à un lapin, à un renard, ou à un animal de ce genre. Bref c'était une super ballade !

P.S. Pas loin du départ du sentier, il y avait un élevage de truites.



La levada de Ribeiro Frio

La plage de Caniçal


Samedi soir, nous allons chercher un cyber café à Caniçal, où coïncidence, c'est la fête locale. On y déguste la spécialité locale les "espetadas". Dans des stands en bois, des morceaux entiers de boeuf sont pendus en plein air, que les vendeurs découpent en gros cubes, saupoudrent d'un mélange d'ail et de gros sel, et enfilent sur des brochettes immenses en bois vert (genre sureau) de plus d'1 mètre de long, que l'on va faire cuire nous-mêmes sur la plage dans des barbecues allumés à cet effet, et que l'on mange avec les doigts ce que bien évidemment les enfants adorent. Il y a également de la musique, d'autres stands le long des rues, où l'on vend des galettes de pain tout chaud, cuit sur place, que l'on coupe en 4 et sur lequel on tartine du beurre à l'ail (en option). Nous nous sommes tous régalés.

Dimanche, le temps est variable, et après les cours, nous partons visiter le jardin botanique et la ville de "Monte" qui porte bien son nom car pour y arriver il a fallu monter des côtes (en ligne droite) dont la déclinaison approchant les 25% nous a causé quelques frayeurs avec notre petite voiture de location qui sentait le chaud à l'arrivée, un 4x4 serait plus indiqué...Et la descente n'a pas été triste non plus.

Lundi, premier jour de pluie, Bastien termine sa première série du CNED et nous allons la poster.

Bastien Raconte


Avant d'arriver à Madère, nous avons vu l'aileron d'une baleine. Le port de Madère c'était une grande réserve. Il y avait des sars, des barracudas, des balistes, des oblades, des bogues, des maquereaux, et des mulets. Le premier jour de notre arrivée, nous sommes allés voir le musée de la baleine à Caniçal. Le lendemain, nous allons à Funchal. Le troisième jour, nous allons dans une forêt et nous suivons une levada. C'était super ! Puis nous allons à Pingo Doce (c'est le nom d'un supermarché). Le lendemain, il faisait un sale temps pour aller se promener, alors nous travaillons.

Mardi, nous partons pour 2 jours faire le tour de l'île. Nous avons réservé un hôtel à Porto Moniz à l'opposé de l'île. Nous contournons l'île par le Nord, le temps est à l'orage. Nous nous arrêtons pour déjeuner à Santana, où les maisons typiques sont rouges, aux volets bleus et aux toits de chaume. De ce côté-ci de l'île, c'est la culture de la vigne en terrasse qui prédomine. C'est la période des vendanges et nous imaginons aisément que la méthode pour vendanger a peu évolué depuis des siècles, du fait même de la déclivité des vignes. Elles sont très hautes, attachées à des piquets et la récolte se fait par dessous, le raisin porté sur le dos dans des toiles de jute.
Nous allons ensuite à Sao Vicente, visiter des grottes volcaniques, sans stalactites ni stalagmites car elles sont basaltiques et non calcaires comme chez nous. De là nous terminons la journée à Porto Moniz où les plus téméraires se baignent dans la piscine municipale d'eau de mer (froide), aménagée dans des rochers naturels. Les enfants sont ravis de cette escapade, et de leur chambre d'hôtel qu'ils partagent, et où je peux me prélasser dans un bon bain chaud, sans craindre de vider les réservoirs du bateau... J'en profite car ce sera sûrement un des seuls de l'année.
Le lendemain matin, il pleut des cordes et nous suivons la route qui longe la côte sud. Par là, c'est la culture des bananes en terrasse qui prédomine jusqu'aux falaises de cabo Girao, qui avec 580 mètres de haut, sont les deuxièmes falaises les plus hautes de monde. Quelles sont les plus hautes ? nous n'avons pas la réponse. Puis, ce sont les cultures maraîchères et nous revenons à la capitale Funchal, où nous allons faire une dégustation de Madère dans les caves. Nous découvrons l'origine du succès de ce vin: Dans le passé, les tonneaux traversaient l'Atlantique pour rentrer en Europe. Le long voyage sous la chaleur des tropiques donnait au vin ce goût particulier qui est maintenant obtenu par un léger chauffage. Il y a différents types de Madère, dont la dénomination va de sec, demi-sec, demi-doux à doux, et se boivent à différents moments du repas. Entre parenthèses, pour les experts en vin que nous connaissons, les différents cépages cultivés sont le Malmsey (le tout premier cépage introduit par les premiers colons), le Bual, le Verdelho, le Sercial, le Tinta Negra et le Terrantez (cépage très rare). En tout cas, pas besoin d'être expert pour la dégustation! Nous avons ramené quelques bouteilles pour les apéros entre bateaux, mais pas trop, je rappelle pour ceux qui l'auraient oublié, le dicton favori du capitaine "Pas de poids sur le bateau!".


Vignoble en terrasse, côte nord

Côte nord, jusqu'à Porto Moniz


Piscine Volcanique de Porto Moniz


Culture de Silver Bananas à Madalena do Mar

Voilà, le jeudi 2 octobre, nous allons faire le plein de provisions en prévision de la traversée de 2 ou 3 jours pour aller aux Canaries et nous rendons la voiture. Malheureusement nous ne pouvons pas partir car il y a un avis de coup de vent sur Madère et nous attendons une météo plus favorable. Les 3 jours suivants, sont consacrés aux cours du CNED, et Romain finit même sa deuxième série, que nous posterons le lundi matin. Le mauvais temps s'accentue, il pleut des trombes d'eau, et le bateau est secoué violemment car il y a des rafales à 35 noeuds de vent dans le port à cause des falaises à proximité. Le capitaine tourne en rond, les enfants s'ennuient un peu car la pêche est interdite dans la marina, qui plus est, elle est quasiment vide, et à part un navigateur solitaire battant pavillon français, il n'y a que des pavillons étrangers, norvégiens, suédois, anglais, allemands et hollandais.
Bref, l'ambiance est quelque peu morose, mais samedi la pluie s'arrête un peu et la marina s'anime en fin d'après-midi. En peu de temps, six bateaux dont quatre français viennent se réfugier au port (les enfants sont maintenant imbattables à reconnaître la nationalité des bateaux grâce à leurs pavillons - ne pas confondre le pavillon hollandais et français de loin). Ils étaient au mouillage à Funchal et ils ne dormaient pas de la nuit à cause du roulis et du risque de collision entre bateaux, malmenés dans tous les sens. A chaque fois, on aide à l'arrimage des bateaux et Romain et Bastien sont surtout très heureux d'accueillir, Flipper, le bateau ayant à son bord Zoé 10 ans et Anatole 3 ans 1/2 sur notre ponton. On est tous restés sur le ponton à papoter et se raconter les dernières nouvelles de la météo. Le lendemain d'autres bateaux arrivent dont un bateau anglais Helice, sur lequel vivent Emily 10 ans et Elisabeth 11 ans. Tout les enfants s'entendent très bien et s'amusent bien malgré le barrage de la langue.

Lundi 6 octobre, Romain va inviter tout ce petit monde pour son anniversaire. L'après-midi est pluvieux et les 6 enfants passent une bonne partie de l'après-midi à jouer aux légos dans la cabine de Romain et essayer de jouer au cluedo. Romain est ravi et gâté car Emily et Elisabeth lui offrent un de leur livre anglais "The day I fell down the toilet and other poems". Zoé et Anatole lui apportent une sculpture, un bateau de pêche avec casier et filet, qu'ils ont fabriqué avec leur papa. Nous lui offrons une boîte de legos Star Wars, trouvée miraculeusement au supermarché de Machico quelques jours auparavant. Sandrine et Manu, un jeune couple, dont le bateau Bamako est mitoyen du nôtre, et avec lequel nous avons bien sympathisé, lui offriront même une casquette de Madère. Nous gardons tout le monde pour l'apéro, et nous passons, grands et petits, une excellente soirée.

Onze bougies pour Romain !

C'est un tournant dans notre voyage, car tant que nous étions sur le continent, nous avons vécu plusieurs semaines uniquement tous les quatre, en ayant peu de contact avec les autres bateaux, et maintenant nous rencontrons des familles, des couples, des navigateurs solitaires, des amis, partis comme nous pour un périple en bateau de plusieurs mois, voire de plusieurs années. D'ailleurs les "équipages" français que nous rencontrons à partir là, nous sommes presque certains de les retrouver au gré des navigations. Nous partageons des informations météo, recettes, mouillages, nous apprenons des trucs et astuces de vieux loups de mer, mais nous parlons aussi de nos projets, angoisses, et bonheurs. C'est très enrichissant d'écouter des personnes qui ont ce mode vie depuis des années et qui partagent volontiers leurs expériences, et c'est rassurant de voir qu'on a plus ou moins tous les mêmes préoccupations, les mêmes galères, les mêmes instants de bonheur en famille.

L'amélioration du temps est prévue pour le mercredi, et les enfants sont moins enthousiastes que d'habitude de quitter le port, même si on sait que l'on reverra sûrement tout le monde aux Canaries. Flipper est obligé d'attendre à Madère, les cours du CNED envoyés une semaine auparavant de France, et qui tardent à arriver. Nous quittons enfin la marina (15 jours, quelle ruine !) par un beau soleil, avec un vent de force raisonnable et une mer qui semble peu agitée, et mettons le cap sur Graciosa, à l'est de l'archipel des Canaries.

 

Graciosa, le 16 octobre 2003

 

Les photos