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Gibraltar, Barbate, Rota, El Rompido, Ayamonte, Faro, Portimao, Lagos, par toujours les mêmes 20 au 26 Août, Gibraltar (suite et fin).
Le lendemain, 25 août, mon capitaine préféré m'avait préparé une surprise avec la complicité des enfants. Je le raconte non pas pour rendre jalouses les copines, mais parce que j'en suis restée toute z'émue, (même si les mauvaises langues diront qu'il y avait du faillotage dans l'air). Pour notre 13ème anniversaire de Mariage, que j'avais un peu oublié pour la première fois (si si c'est vrai), mon époux m'a emmené ce soir là dans un très bon restaurant espagnol (sur le quai à 100 mètres du bateau), pendant que les enfants, après avoir mangé, regardaient tranquillement un DVD dans le carré. A l'attention des mamies, les enfants pouvaient nous joindre en permanence grâce à nos talkies walkies, dont nous ne pouvons plus nous passer. Un vrai Bonheur! Nous avons fait le tour de Gibraltar et nous sommes impatients de repartir. Ici la vie est assez chère malgré les magasins duty free (ça rappelle l'Andorre), car la monnaie officielle est la Livre, et le taux de change en Euro est élevé et aléatoire suivant les magasins (Ex: 8£ = 15€ pour une lessive dans un lavomatic)! Donc, le moral de l'équipage est au beau fixe et
nous décidons de traverser le détroit le 27 août (départ
8h pour partir marée descendante). En effet, pour traverser le
détroit, si l'on ne veut pas faire machine arrière, il faut
bien choisir son heure de passage après avoir étudié
des tables assez complexes qui prennent en compte les paramètres
suivants: Ce jour là, la météo n'est pas vraiment clémente, vent d'ouest (c'est-à-dire de face pour nous) force 4 le matin à 6 dans l'après-midi. Pas de changement dans les jours à venir, donc si nous ne partons pas dans ces conditions, nous resterons longtemps à Gibraltar. Le responsable de la marina pense que ça devrait être jouable le matin, le vent étant généralement plus faible. C'est donc relativement confiant que nous partons à 8h, sauf que lorsque nous sortons de la baie de Gibraltar qui est en fait abritée, nous prenons force 6 à 7 (25 à 30 noeuds) dans le nez à l'est du détroit, et nous avançons péniblement même si le courant nous est relativement favorable. Je ne ferai pas de commentaire sur le moment, mais je note quand même que ce matin là, nous sommes le seul voilier à quitter Gibraltar pour traverser le détroit vers l'Ouest. Le capitaine avouera même avoir pensé à faire demi tour pendant quelque temps! Mais sachant que le vent doit faiblir au fur et à mesure de notre progression vers la sortie du détroit, il fallait insister et passer en force. Et finalement, une heure plus tard le vent n'est plus que de 15 noeuds, toujours de face, mais très praticable, d'autant que la mer est peu agitée.
Tarifa, on est enfin en Atlantique, et nous apercevons déjà un aileron (requin ou tortue, les avis sont partagés et même un balaineau (un vrai!). Finalement nous nous abritons au port de Barbate pour la nuit (arrivée vers 16h30) car la mer est encore agitée et nous ne sentons pas une traversée de nuit, surtout moi, dans cette zone très fréquentée par les pêcheurs (on ne regrettera pas notre décision). Et puis, nous avions parcouru 43 miles en 8h30 ce qui nous avait épuisé moralement!
28 Août, de Barbate à Rota, 41 miles en 6 heures de navigation. Barbate, anciennement "Barbate de Franco" mais ils ont laissé tombé "de Franco" depuis quelques temps, n'offre que l'intérêt d'être bien placée, juste a l'entrée du détroit coté Ouest. A part ça, c'est ennuyeux à mourir, et nous n'y passerons qu'une seule nuit. Au matin, direction le cap de Trafalgar. Tout l'équipage est aux aguêts, des fois que les anglais nous refassent le fameux coup du même nom, qui coûtat à Napoléon une partie de sa flotte et ses ambitions sur l'Angleterre: trentre-trois navires furent coulés en six heures! Mais aujourd'hui les parages sont déserts, pas l'ombre d'un fantôme lorsque nous "survolons" le champ de bataille. Les seuls dangers sont les hauts-fonds entre lesquels nous slalomons, au moteur, le vent étant toujours faible et dans le nez.
30 Août au 2 Septembre, dernières
étapes espagnoles. De nombreuses rivières forment des estuaires navigables sur la côte atlantique de l'Andalousie, et sur celle du Portugal. Nous décidons que la prochaine étape sera un mouillage dans le Rio de Las Piedras, devant le petit village de "El Rompido". Nous quittons Rota au matin. Moteur, mer belle. En arrivant à l'embouchure du Guadalquivir, vers 10 heures, nous croisons la route de nos amis les dauphins, en pleine chasse au milieu des filets et bateaux de pêche, par seulement 15 mètres de fond.. Ils sont gros et nombreux, et ce sont les meilleurs sauteurs que nous ayons vu depuis le départ. L'un d'entre eux doit être échappé d'un marineland: il nous fait deux sauts à presque deux fois sa hauteur (ça doit faire dans les 6 à 8 mètres de haut!), avec vrille et pichenette de la queue. Les rencontres avec les dauphins ont beau se répéter, on ne s'en lasse pas!
La fin de la journée se passe à lutter contre le vent, qui s'est enfin levé, mais toujours de face. En fait, nous entrons dans une région où un vent thermique (une brise qui souffle de la mer vers la terre) se lève tous les jours vers 14 heures, en forcissant progressivement jusqu'au coucher du soleil jusqu'à 20-25 noeuds, et venant du sud-ouest. Donc ... de face, comme toujours depuis maintenant plus de deux semaines. Il nous faudra s'y habituer, ce sera comme ça jusqu'à Lagos. Au moins c'est prévisible et toujours fidèle. Nous arrivons donc vers 17 heures en vue de la passe d'entrée du Rio de Las Piedras. C'est bien balisé, comme à l'école pour le permis mer (où nous ne sommes jamais allés d'ailleurs): une bouée qui marque les eaux saines, puis une succession de bouées tribord et babord qui indiquent le chenal à suivre. Et personne ne s'amuse à passer ailleurs, le fond est à 2 mètres sous le bateau vers l'entrée de la passe, et les vagues soulevées par le vent nous font craindre l'atterissage involontaire sur un banc de sable. Mais tout se passe bien, d'ailleurs les pécheurs empruntent ce chenal avec des bateaux plus gros. Nous remontons ce large rio sur 5 miles, et mouillons en face du village d'El Rompido, à marée haute, par 4 mètres de fond. La nuit ne sera pas très sereine. C'est une première pour nous de mouiller dans une rivière soumise à la marée. Outre le vent qui souffle toujours à 20 noeuds, le courant va s'inverser avec le jusant (marée descendante), et l'amplitude de la marée est d'environ 3 mètres. Le fond du rio remonte pas très loin du bateau. Le risque est soit que l'ancre dérape à cause du vent et des courants, soit que le bateau en tournant autour de son ancre ne vienne s'échouer sur une zone moins profonde. Nous autres débutants sommes un peu inquiets, je décide de dormir dans le carré à côté des instruments de bord qui peuvent emettre tout un tas de gentils bip bip d'alarme dès que le bateau sort d'un périmètre de sécurité. La nuit sera donc assez pauvre en sommeil, mais finalement rien ne se passe. Il faudra attendre le lendemain midi, lorsque la vigilance a fait place insidieusement à la confiance, pour se retrouver bel et bien échoué. Vers 11 heures, nous étions partis explorer la berge à marée basse, en annexe. Débarquement sur une plage gadouilleuse, grouillante de gros crabes que nous ne réussirons pas à attraper. Promenade, photos, et puis retour au bateau pour le déjeuner. Entre temps le vent avait discrètement tourné dans une direction opposée, et malgré le flot de la marée remontante, nous avons été déposés en douceur sur un banc de sable et d'algues. L'avantage c'est que, posé par terre, un bateau est d'un remaquable stabilité, le repas s'est déroulé bien calmement! Sauf que, même si ce catamaran est conçu pour s'échouer sans dommage, c'était quand même angoissant de ne pas savoir exactement sur quoi on était posés. Sans compter la vexation de s'être fait avoir comme des bleus. Finalement, deux heures plus tard, le flot nous descotchera sans trop d'histoire, et nous irons mouiller un peu plus loin pour plus de tranquilité.
Lundi 1er Septembre, nous quittons le mouillage pour redescendre le rio et rejoindre la mer, et gagner un peu plus vers l'Ouest. La date évoque plus la rentrée que le voyage, on apprécie d'autant plus la tranquille descente, portés par le jusant dans le calme du matin ensoleillé. Nous avons une pensée émue pour nos amis et collègues en pleine rentrée, et des frissons rien que d'y penser. Notre journée de navigation nous conduit au port de Ayamonte, la ville la plus occidentale de l'Andalousie, située sur l'embouchure du Rio Guadiana qui sépare l'Espagne du Portugal. L'accostage au ponton d'accueil est assez difficile avec un fort vent dans le dos (notre ami le thermique) doublé du flot de la marée montante, également dans le dos. Les deux moteurs suffisent à peine. La manoeuvre terminée, deux marineros nous annoncent, débonnaires, que le port est complet et qu'il faut repartir. J'avais pourtant pris la peine de téléphoner pour réserver. Heureusement le bureau du port se montrera compréhensif et nous aurons droit à une nuit au ponton d'accueil. La ville est très jolie et peu touristique, avec des places entières recouvertes de faiences andalouses. 2 au 6 Septembre, Premières étapes au Portugal. Faro, Portimaõ, Lagos Notre prochaine étape doit nous conduire à Faro, en Algarve, au Portugal. En quittant l'Espagne nous avons fait un sondage familial pour savoir ce que nous avions aimé lors de notre séjour en Espagne. Côté aventure, il y a bien entendu les rencontres avec les dauphins et les globicéphales, côté découverte, elles sont surtout alimentaires, la horchata de chufa (boisson à base de lait d'amandes de pays), et bien évidemment les tapas ... Selon le scénario habituel, pas de vent le matin, avant que le thermique se lève. On en profite pour pêcher à la traine, maintenant que nous avons "vaincu le signe indien" et que notre canne a goûté au poisson. Nous sommes au large des côtes portugaises, à une quinzaine de miles, la mer est encore calme. Nous sommes à table lorsque nous entendons le bruit d'un moteur qui se rapproche assez rapidement. Je sors pour vérifier, il n'y a qu'un bateau en vue, et il nous fonce dessus! C'est une petite vedette avec trois hommes à bord. Le sillage de leur bateau indique clairement qu'ils ont changé de cap pour venir sur nous. Il est clair qu'ils vont couper la ligne de traine, et malgré mes gestes, ils passent juste sur notre arrière et coupent notre ligne, emportant fil, émerillon, leurre et hameçon. Bienvenue au Portugal ! Bastien fond en larmes devant la méchanceté de ces énergumènes. On tente de le consoler en lui expliquant que la bêtise est universelle, mais ça n'est pas le moment pour les beaux discours. Déjà Romain et lui parlent de vengeance ! Ainsi va le monde ... La pêche est finie pour aujourd'hui. Le thermique se lève bientôt, d'abord raisonnable pour du vent de face, puis franchement désagréable, nous obligeant à tirer des bords pour remonter le vent et les vagues. Nous croisons notre premier filet portuguais, il est impressionant: constitué d'une multitude de flotteurs très rapprochés (quelques mètres), il ne nous aurait laissé aucune chance si nous ne l'avions pas évité. Pascale l'a aperçu au dernier moment, car il n'était pas signalé par des drapeaux comme d'habitude. Un bateau de pêche était posté en surveillance, mais de l'autre coté et occupé à prévenir un voilier arrivant en sens inverse. Le vent forcit encore, nous finissons avec deux ris dans la grand voile, et nous rejoignons péniblement la "Bara Nova", entrée de la passe qui conduit du "Cabo de Santa Maria" au lagon de Faro et d'Olhao. Quelques grands dauphins jouent dans les fortes vagues, nous n'appelons pas les enfants, ils sont mieux à l'intérieur. Une fois la passe franchie, il n'y a plus de vagues, juste le vent. Ne connaissant pas les lieux, et sans carte précise car les fonds de sable se déplacent en permanence, nous décidons de mouiller dans ce lagon, appelé "Mar Santo", à coté du chenal, par quatre mètres de fond à marée haute. Nous y passerons une nuit relativement tranquille, une fois le vent calmé. Le lendemain matin, nous quittons ce mouillage pour rejoindre le port de Faro. Il s'agit de remonter une rivière qui serpente pendant 5 miles au milieu de marécages et de dunes. On pourrait se croire chez nous en Camargue. L'endroit est classé réserve naturelle, nous observons de nombreux oiseaux: hérons, cigognes, et autres espèces aussi inconnues que variées. La rivière se resserre petit à petit, et les fonds remontent. Devant le port de commerce, il n'y a plus que 7 mètres. Deux cargos rouillés gisent sur le flanc à côté de quais déserts. Le port ne semble pas en activité. Nous continuons vers l'amont pour trouver le port de plaisance, les fonds ne sont bientôt plus que de quelques mètres. Finalement nous découvrons qu'il n'y a pas de port de plaisance à Faro. Lorsque les fonds atteignent 1m70, sachant que nous sommes à marée haute, nous faisons demi-tour et mouillons un peu plus en aval au bord des marécages, avec vue directe sur les oiseaux. Nous y passerons deux jours, au calme, tout juste les avions en approche de l'aéroport de Faro pour nous distraire des oiseaux et des poissons. Nous explorons en annexe, à la rame, les mini rios qui se faufilent dans la végétation. On surprend quelques oiseaux dans leur milieu naturel. C'est un plaisir que de se laisser ensuite emporter doucement par la marée descendante qui nous ramène à la rivière et au bateau.
Nous quittons Faro pour Portimaõ le 5 Septembre, en espérant pouvoir enfin mettre pied à terre au Portugal le soir. Portimaõ se vante d'accueillir la plus grande marina du Portugal, et nous trouverons en effet facilement de la place, et un accueil sympa. Nous n'y resterons qu'une nuit car c'est loin de la ville et des services qu'on peut attendre d'une marina. Nous aurons quand même le temps de nous offrir notre premier repas portugais, avec de la morue au menu, puisqu'il parait que c'est le plat national du pays. Ca tombe bien, on adore ça! Nous atteignons Lagos le lendemain à midi, avec l'intention d'y séjourner une semaine au moins, le temps de recevoir les cours du CNED de Bastien, et de se préparer à la traversée vers Madère, notre prochaine étape. Il faut aussi avancer le programme pour Romain, il y aura bientôt une série de devoirs à envoyer. Sans oublier de faire un peu les touristes, l'Algarve est une région magnifique. Lagos, le 9 Septembre 2003 |
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