Les Grenadines II, Le Retour

Deuxième Partie: De Grenade à la Martinique
Carriacou, Union, Petit Saint Vincent, Petite Martinique, Tobago Cays, Mayreau, Bequia, Saint-Vincent, Sainte-Lucie


Carriacou
Quitter Grenade, ça signifie remonter vers le Nord. Nous n'irons pas plus au sud que 11°59' de latitude nord. A partir de maintenant, on se rapproche de la maison, heureusement nous allons faire le retour en omnibus, avec plein de minutes d'arrêt à chaque station. Le 16 Janvier, nous mettons donc le cap sur Carriacou, l'île la plus au sud de l'archipel des Grenadines, et appartenant à l'état de Grenade. C'est là que nous devons faire les formalités de sortie. Rien de particulier à dire de cette remontée sous le vent de Grenade, comme souvent dans un vent variable ou faible, ou alors sous les grains. Nous atteignons Tyrell Bay avant la nuit, sans avoir rien pêché. On se console devant un apéro Ti-Punch sur Zed, suivi d'un resto sur la plage jusqu'à tard. Les enfants dorment seuls sur les bateaux au mouillage, comme nous en avons maintenant pris l'habitude. Dans la nuit, un grain n'a pas réussi à me réveiller malgré le hublot ouvert au dessus de ma tête (on était bien fatigués ...), je n'ai donc pas pu fermer les autres hublots, et au matin nous trouvons les cabines mouillées, ainsi que certaines affaires scolaires de Romain!
Après une rapide visite à la "capitale", Hillsborough, pour effectuer les formalités et quelques courses, nous quittons Tyrell Bay en direction de Chatam Bay, sur l'île de Union. Malgré ce bref séjour, je garde de Carriacou l'impression d'une belle île, peu développée au tourisme et encore assez authentique. Elle mérite mieux qu'un arrêt de 24 heures.

Réunion à Union
Nous traversons le "Martinique Channel" (le Canal de la Martinique, on est pourtant encore loin de la Martinique!), en rang par trois: Kadavu, Zed, et Imagine, trois Outremer 45 comme à la parade, il ne manque que l'hélico pour prendre les photos. A 17 heures, nous faisons notre entrée dans Chatam Bay, en "navigation synchronisée". Il faut dire que nous sommes attendus: il y a un rendez-vous pour des retrouvailles entre une dizaine de bateaux français rencontrés au gré des escales avant la traversée de l'Atlantique: Tomadji, Moana, Glazik, Ocealys, et j'en passe ... A peine l'ancre mouillée, nous sautons dans les annexes pour nous regrouper sur la plage de cette superbe baie sauvage, et prendre une photo de famille. Les enfants se défoulent sur la plage, ça fait une sacré bande de sauvages!

Après les avoir couchés, c'est la grande fête sur la plage avec langoustes et poissons grillés, rhum, zouk et reggae sous un magnifique ciel étoilé. Un candidat au bain de minuit (je ne citerai pas de nom, rassures-toi Yves) ressort aussitôt, mordu ou brûlé par une bestiole non identifiée, le pauvre est assez mal et va se coucher. A ce moment là, on s'aperçoit qu'il manque deux annexes sur la plage, elles sont reparties toutes seules! (ça me rappelle quelque chose, voir l'épisode des Baléares ...). Tout le monde part à leur recherche, armés de gros projecteurs. Des centaines de poissons surpris par ces faisceaux intenses sautent fébrilement devant nos embarcations, un peu plus on s'en prendrait un en pleine figure. Heureusement la configuration des lieux a empêché les annexes volages de prendre le large, et nous les retrouvons sur les cailloux, intactes, de l'autre coté de la baie. Cet épisode met fin à la soirée un peu prématurément, mais il en restera un bon souvenir quand même!

Le lendemain matin, il faut quand même faire l'école. Je fais également une séance de grattage de coque. Nous apercevons la tête d'une tortue qui nage à une trentaine de mètres derrière le bateau. L'après-midi, les enfants jouent sur la plage. C'est dimanche, et nous ne sommes pas seuls sur cette plage, quelques locaux s'y prélassent également (sans doute moins d'une dizaine pour 500m de plage). Je discute avec trois femmes assises sous un arbre avec un bébé. Elles me racontent qu'elles sont venues de l'île de Saint-Vincent pour trouver du travail dans l'hôtellerie.

Chatam Bay

L'une d'elle se prépare un rhum coca, à la manière locale: elle décapsule la bouteille de coca avec les dents, en remplit le verre jusqu'au quart, ... et complète les trois quarts manquants avec le rhum! C'est vrai que le rhum est beaucoup moins cher que le coca. Je refuse poliment de goûter à son breuvage, il n'est que 14h et le soleil tape fort. Sans se décourager, elle se roule un pétard de ganja (le nom local du cannabis), pour accompagner son rhum coca. Je re-refuse poliment lorsqu'elle me propose d'aspirer dans ce bazar. Elle, ça ne l'empêche pas de discuter normalement, avec son bébé dans les bras, comme si elle buvait un lait fraise. Elle m'explique qu'une grande partie de la population locale fume la ganja plusieurs fois par jour, bien que cela soit officiellement illégal. Elle ajoute que c'est naturel, ça ne peut pas faire de mal, ce n'est pas comme ces nouvelles substances, le crack, etc, ... Charmantes, ces habitantes.
Je rejoins le camp des français, et emmène Romain et Charles de Kadavu plonger sur les récifs. Il y a un beau tombant, pas très profond où nous observons toutes sortes de poissons et même une tortue. Sur les rochers, une bande de pélicans nous regarde nonchalamment et semblent échanger des commentaires entre eux, ils me font penser aux vautours dans "Le livre de la jungle".
La journée se termine, comme souvent par un apéro sur Zed.
La nuit est agitée: vers 3h du matin, nous sommes réveillés par des mouvements inhabituels du bateau et le bruit des moteurs qui démarrent sur les bateaux voisins. Une houle s'est formée et rentre dans la baie pourtant bien protégée. De gros rouleaux se fracassent par série de trois tout près des bateaux au mouillage derrière nous. Le phénomène ne dure qu'à peine une heure, puis la houle se dissipe assez vite. Nous nous interrogeons sur sa cause: éruption ou séisme sous-marin, ou plus simplement énorme orage quelque part? Toujours est-il que l'eau de la baie est devenue trouble, et que nous décidons de quitter l'endroit. De toutes façons il faut aller faire les formalités d'entrée (de re-entrée pour nous) dans les Grenadines de Saint-Vincent. Nous retournons donc à Clifton Harbour, ce beau mouillage face à une barrière de corail où nous étions dix jours plus tôt. En fin d'après-midi, je plonge et rencontre une raie de belle taille qui chasse dans 50 cm d'eau. Nous passons encore une soirée au restaurant (les enfants sont couchés!), le Lambi's Bar. A ce rythme, il va être difficile de garder la ligne!


Happy Island


Imagine à Clifton Harbour

Pour éliminer, nous faisons un beach-volley le lendemain sur la plage, ainsi que de longues séances de plongée. Et pour se remettre de tout ce sport, le soir, c'est l'apéro sur "Happy Island", un minuscule îlot que son occupant courageux et entêté à construit de ses propres mains en accumulant patiemment des milliers de lambis, ces gros coquillages roses et nacrés que l'on trouve partout par ici. Le travail a commencé en mai 2002, et il continue encore tous les jours pour agrandir son domaine. Les autorités locales l'ont apparemment laissé faire. En tous cas, nous dégustons de succulents pina colada et autres cocktails, et il parait que ses langoustes grillées sont un must. Ce sera pour une autre fois.

Petit Saint-Vincent, Morpion, et Petite-Martinique
Toutes ces îles sont minuscules, c'est sans doute pour cette raison que leurs découvreurs ne se sont pas trop fatigués pour leur trouver un nom propre. Beaucoup ne sont que des "petit" (ou des "petite") ceci-cela : Petit Saint-Vincent, Petite-Martinique, Petite-Dominique, Petit-Nevis, ...

Un de ces îlots est tellement microscopique qu'il s'appelle Morpion, et ça fait longtemps que ça nous démange d'y poser nos fesses. On le voit partout dans les catalogues de vacances: c'est une langue de sable d'une trentaine de mètres de long, accrochée sur le corail, sur laquelle est plantée une unique paillote en feuilles de palmes séchées. L'image de l'île déserte en miniature. Nous y passons quelques heures avec les enfants, qui entreprennent d'y construire des fortifications et de modifier son relief en érigeant une montagne de sable. Les fonds coralliens tout autour méritent aussi une plongée. Nous déjeunons sur le bateau avec vue imprenable sur cette carte postale des Grenadines.

Morpion à babord

Nous levons l'ancre à l'heure de la sieste pour aller faire le plein de carburant sur l'île de Petite Martinique, à dix minutes de Morpion, et réputée la moins chère des Grenadines. Nous faisons route vers l'endroit présumé de la station service, où seul un vieux ponton de bois délabré indique qu'une pompe peut éventuellement se trouver là. Un cata de promenade du Club-Med occupe l'extrémité de ce ponton, il ne nous reste qu'à nous amarrer le long de ces planches de bois pourries, battues par les vagues et perpendiculaires au vent. Le ressac nous projette contre ce quai fragile, sous l'oeil hagard de quelques locaux qui n'ont visiblement ni l'envie ni l'énergie pour nous aider. On s'en sort tout seul, Romain saute sur le quai pour nous amarrer et nous nous appuyons sur tous nos pares-battage placés du même côté. Ça tiendra bien le temps de faire le plein! Les yeux rouges du pompiste en chef en disent long sur la quantité de ganja qu'il a du fumer depuis sa naissance! Impossible de lui faire dire plus d'un mot par phrase. Enfin, ce n'est pas cher (6 EC par gallon, soit environ 40 centimes d'euro le litre de gasoil). On quitte finalement ce quai tant bien que mal, moteurs à fond entre deux vagues, pour aller mouiller sous le vent de l'île de Petit Saint-Vincent (PSV). Nous retrouvons Oscar, un Oceanis 381 parti de La Grande Motte, puis Kadavu vient nous rejoindre. Le soir du 21 Janvier nous fêtons le nouvel an dont Kadavu avait été privé pour cause de navigation transatlantique. Le matin, nous avions acheté à un pêcheur pour 50 EC (environ 15 euros) deux grosses langoustes, deux plus petites, et un gros crabe. Nous complétons avec du saumon fumé, et ... du camembert! Sans oublier une bonne bouteille de vin rouge bien sûr.
Le lendemain après l'école, nous allons re-mouiller à Morpion, où nous passons quelques heures inoubliables, tout seuls. Kadavu nous y rejoint un peu plus tard. Retour au mouillage de Petit Saint-Vincent le soir, suivi du traditionnel apéro, cette fois sur Imagine.


Seuls sur Morpion

Mouillage de Petit Saint-Vincent

Nous aimons bien cet endroit, et décidons d'y passer une journée supplémentaire. Le matin, Geoffroy nous emmène sur sa belle annexe toute neuve à fond d'aluminium (achetée à Grenade) faire des courses sur Petite-Martinique. Elle est sympa cette île, et mériterait une visite plus approfondie. Notre chemin traverse l'école primaire, dont les deux bâtisses encadrent la rue principale du village. Une classe d'une cinquantaine d'élèves chante une chanson religieuse sur un air de calypso joué à la guitare par l'institutrice. Nous stoppons près de la fenêtre, fascinés, pour les écouter. A la fin nous ne pouvons pas nous empêcher d'applaudir. Moment magique. Quand nous repassons avec nos courses, c'est l'heure de la récréation. La cour de récré ferait rêver nos écoliers: c'est un vaste pré que borde la plage et ses eaux turquoises, avec des chèvres qui gambadent, et des armatures en bois de bateaux en construction. Les élèves, en uniforme chemise bleue et short gris, jouent bruyamment dans ce tableau, ça donne envie d'aller à l'école!
L'après-midi, Kadavu nous quitte pour les Tobago Cays, nous passons des heures tranquilles à faire le tour de l'île de Petit Saint-Vincent à pied. Cette île est très belle, elle a conservé un aspect sauvage malgré (ou grâce à) l'hôtel de luxe qui l'occupe exclusivement. Il faut dire qu'il n'y a que 22 bungalows disséminés dans la verdure, que l'on peut louer pour la modique somme de 1000 dollars américains ... par jour! On ne voit personne, il ne doit pas y avoir foule de clients. Pourtant des collations sont prêtes devant chacune des petites paillotes cachées en bord de plage sous la végétation. Nous nous approchons de l'une d'elle pour voir, et aussitôt un garde qui surveillait discrètement se montre pour nous signifier qu'il est interdit de toucher et de pénétrer dans cette île privée. Nous nous contenterons de la magnifique plage, quasiment déserte (et gratuite!), dont nous profiterons jusqu'au coucher du soleil. Le soir nous achetons du thon à des pêcheurs locaux, et pour une fois, nous allons au lit de bonne heure!

Retour aux Tobago Cays
Le 24 janvier, nous partons rejoindre nos amis au mouillage des Tobago Cays, distantes de 8 miles de Petit Saint-Vincent. Nous mouillons peu avant midi, par 2 mètres de fond de sable blanc, juste à coté de la plage de Baradal, face à la barrière de corail et à l'océan. C'est toujours aussi beau, et un peu moins venté que lors de notre premier passage. Nous en profitons pour retourner plonger sur le corail, mais cette fois-ci nous passons la barrière pour admirer le beau tombant du Horse Shoe reef. La profondeur passe de 2 à 20 mètres et cette paroi verticale sous-marine impressionne beaucoup Bastien, qui retourne à l'annexe avec Pascale. Il avait peur de voir des requins! En fait, un requin dormeur sera observé par Kadavu pendant cette plongée, mais nous n'aurons pas cette chance. Cet animal paisible dormant sur le fond aurait peut-être changé l'idée que Bastien se fait des "méchants requins".


Imagine devant Baradal

Les 3 Outremers aux Tobago Cays

Le soir nous faisons griller sur la plage des langoustes que nous avions négociées le matin avant le départ de Petit Saint-Vincent, encore une belle soirée barbecue!
Le lendemain, nous avons programmé une plongée à la recherche des tortues marines qui paraît-il ont l'habitude de brouter les algues tout près de l'îlot de Baradal. En effet, nous les trouvons sans peine, non loin du bateau et par quelques mètres de profondeur. Nous en observons plusieurs pendant 20 minutes, jusqu'à ce qu'elles finissent par fuir la meute des enfants qui les poursuivent d'un peu trop près. Nous regardons aussi avec curiosité un banc de seiche. Et après cette séance de sciences naturelles, les enfants (et les parents!) se mettent à leurs devoirs. Puis, après un goûter-gateaux sur la plage avec tous les enfants des bateaux, tout le monde rentre chez soi, et au lit de bonne heure (le barbecue de la veille avait laissé des traces ...). Quelques grains avec 30 noeuds de vent bercent notre sommeil.

Le jour suivant débute par l'école, puis par une "récré-tortues". C'est trop beau d'avoir ce spectacle à quelques brasses de chez soi. Elles sont quatre ce matin, et nous sommes seuls avec elles, ce qui nous permet un peu plus d'intimité. Les enfants ont compris la leçon de la veille et évitent de les effrayer. Avec patience et précaution, je parviens à plonger et à me faire accepter à un mètre de l'une d'elles sur le fond. Elle broute en me regardant du coin de l'oeil, indifférente, un peu comme une vache.

Quelques minutes plus tard, une belle raie noire tachetée de points blancs me passe dessous. Son corps mesure environ 80 cm de diamètre, sa queue est interminable, très fine, elle mesure au moins 2m50. C'est une raie léopard. Splendide!

L'après-midi est consacré à l'exploration de Jamesby. Ce minuscule îlot, dont on fait le tour en un quart d'heure, a une très mignonne petite plage de sable avec cocotiers, que surplombe des rochers d'une dizaine de mètres de hauteur. Nous les escaladons et marchons parmi les cactus et autres plantes urtiquantes. Romain, parti seul avec Charles de Kadavu, verra même un iguane. Le sommet de Jamesby offre un beau point de vue sur le lagon des Tobago Cays, dommage qu'il se mette à pleuvoir et que le ciel se bouche! Les grains se succèdent jusqu'au milieu de la nuit (ça ne nous empêche pas d'aller prendre le dessert chez Kadavu pendant que les enfants dorment sur Imagine), avec de fortes pluies et des rafales à trente noeuds. La saison des pluies est censée être terminée depuis un mois, il n'y a plus de climat!

La plage de Jamesby

Les jours passent et se ressemblent (qui s'en plaindrait ici!). Sauf que la récré tortue du lendemain est compromise par un incident qui aurait pu sérieusement troubler notre quiétude. Bastien, qui s'était mis à ses devoirs dès 7 heures du matin, fait le tour du bateau pendant sa pause, et tombe à travers le hublot ouvert des toilettes bâbord. Il a pourtant l'habitude des pièges du bateau! Les hurlements sont sûrement audibles jusqu'à l'autre bout du lagon, et nous avons très peur d'une fracture pendant un moment. Il s'en sortira avec un bel hématome en travers de la cuisse et des éraflures sur la jambe. Donc pas de récré-tortue ce matin. On compensera par l'exploration de Petit-Bateau, un autre îlot du lagon, très joli également. Le soir, c'est Moana qui invite pour l'apéro. Alec de Kadavu dort sur Imagine avec Bastien.

Bastien Raconte

Morpion
Morpion est une toute petite île de sable où nous nous arrêtons pour y passer quelques heures et nous allons nous amuser sur l'île-plage. Le lendemain nous revenons sur l'île avec Kadavu. Nous nous amusons beaucoup à faire une énorme montagne et après nous nous roulons dans le sable et nous plongeons dans l'eau. Et au soir, comme Papa et Maman étaient partis avant sur Imagine à Petit Saint-Vincent juste à côté, Kadavu nous y ramena. Le soir nous jouons avec eux jusqu'à l'heure où nous devons nous coucher.

Tobago Cays
Nous retournons aux Tobago Cays où il y avait tous nos bateaux amis et nous achetons plusieurs langoustes pour faire une fête le soir, et que j'aille dormir sur Kadavu, et que Charles vienne dormir sur Imagine. On nous avait informé que tous les matins à 10 heures il y avait des tortues, alors nous allons les voir tous les matins. Avant que je vois les tortues, je vis un banc de seiches, puis ma première tortue. Elle broutait les algues, ses membres étaient verts et sa carapace marron avec un quadrillage noir. Le seul ennui c'était que tous les enfants à part moi allaient les caresser par derrière et les faisaient fuir. Aussi nous sommes allés voir une barrière de corail très jolie, et quand nous arrivons à la fin de la barrière, nous ne voyons plus le fond tellement c'était profond. Et quand nous remontions dans l'annexe, nous entendions Kadavu crier: "un requin!". Mais le temps que nous remettions nos masques, palmes et tubas, le requin était déjà parti! Charles nous a raconté qu'il suivait le requin qui s'est retourné et Charles avait eu très peur.

Mayreau et Bequia
Le 28 janvier, nous décidons d'aller voir dans la baie d'à côté si l'eau est plus bleue, plus précisément à Salt-Whistle bay, sur l'île de Mayreau, à 3 miles de là (grande étape!). Nous naviguons au moteur une demi-heure, juste le temps de nous faire copieusement rincer par un des grains quotidiens. C'est en ciré-sur-maillot-de-bain (très sexy comme accoutrement) que nous mouillons en fin de matinée dans cette petite baie de carte postale, malheureusement forte encombrée, et à l'eau un peu trouble. Mais la plage est très belle, avec les cocotiers et tout ce qu'il faut. Les enfants y jouent tout l'après-midi tandis que nous montons au sommet de Mayreau pour y admirer un superbe point de vue sur les Grenadines tout autour de nous. Nous visitons également l'unique village de l'île (qui n'a pas de nom), un ensemble de petites maisons en bois colorées, accrochées à la colline et surplombant la plage de Saline Bay. Le soir, énième dégustation de langoustes grillées sur la plage, mais on ne s'en lasse toujours pas!


Salt Whistle Bay

Les Tobago Cays vues depuis Mayreau

La nuit n'est pas des plus tranquilles, à cause de l'évitage fantaisiste des bateaux (l'évitage c'est le terme qui désigne les déplacements d'un bateau autour de son ancre quand il est au mouillage). Les bateaux sont tellement serrés que certains se frôlent ou se touchent quand ils réagissent diversement aux courants et risées qui parcourent la petite baie. Certains se retrouvent cul à la plage, dans les vagues, il vaut mieux réagir avant de se retrouver vautré dans le sable! Heureusement tout cela nous sera épargné (nous sommes des gens raisonnables et prudents), mais troublera quand même notre sommeil. Au matin, le temps est gris et froid, on se croirait presque en hiver, il doit faire moins de 25 degrés! La baie a perdu de son charme, nous partons rejoindre d'autres bateaux dans la baie voisine de Saline Bay. Avec tous ces mouillages, notre guindeau (l'appareil qui sert à descendre et remonter l'ancre et la chaîne) montre des signes de faiblesse et se bloque. Je le démonte pour la deuxième fois depuis Sainte-Lucie. Un petit nettoyage des charbons et il semble vouloir repartir. Affaire à suivre ... Comme d'habitude les enfants retrouvent leur bande de copains sur la plage. Je reste au bateau pour gratter les coques, c'est décourageant de voir à quelle vitesse ça pousse et ça repousse toute cette flore et cette faune, il faudrait gratter tous les jours!

Nous avons réservé un restaurant pour le soir, "Chez Robert". Ça sonne bien franchouillard, mais quand on voit le dit Robert, surnommé Bob, on comprend vite qu'on est chez les rastas et non pas au routier du coin. Nous sommes au moins 25 adultes et autant d'enfants. Nous mangeons, buvons, et dansons, dans une joyeuse ambiance, avec les locaux. Ici on côtoie facilement les habitants, et on peut discuter sans ressentir le moindre intéressement de leur part, comme c'est trop souvent le cas quand on arrive comme des touristes. Nous avons eu une très bonne impression des gens de Mayreau. Ce soir-là, même les enfants se sont couchés très tard.

Le lendemain, c'est le 30 janvier, cette date marque pour nous la mi-parcours après 6 mois de voyage. Déjà! Impossible de ne pas penser qu'on va maintenant compter à rebours... jusqu'à l'arrivée. Ces premiers mois ont été riches, intenses, et vécus pleinement. Il y a eu beaucoup de bonheur, beaucoup de difficultés aussi, et la vie quotidienne n'est pas toujours facile (on ne raconte que le meilleur ...). Mais tout le monde est heureux de cette nouvelle vie, et le retour à la vie d'avant ne se fera pas sans mal. Enfin, profitons des 6 mois qui nous restent. A commencer ce matin par CNED, courses, bricolage, il ne manque que la lessive pour compléter le tableau! Pascale monte au village avec Yannick, elles reviendront bredouille, le petit cargo qui avitaille l'île n'est pas encore passé cette semaine.
L'après-midi, nous allons avec quelques amis à la chasse sous-marine pour tenter de manger frais. Dans un trou sous un rocher, j'aperçois deux yeux et le corps de ce qui me semble être un mérou. Erreur! je viens de tirer un diodon. Il se gonfle instantanément en une grosse boule couverte de longues épines, c'est sa technique de défense. Non seulement j'ai honte (seuls les japonais mangent ce genre de truc), mais en plus je ne sais plus comment faire pour le relâcher. Au bout d'un quart d'heure, j'arrive à dégager ma flèche en mettant une palme sur la tête du poisson qui se laisse faire. Il n'est que légèrement blessé et repart en se dégonflant. Je suis bredouille. Consolation, nous avons quand même vu un requin dormeur, assoupi sous un rocher. Il nous faudra finalement deux séances de chasse pour amasser de quoi faire un barbecue le lendemain sur Kadavu.
Le 1er février, nous mettons le cap sur Bequia, qui bouclera notre circuit dans les Grenadines. Zed et Kadavu, les deux autres Outremer 45, régatent avec Glazik, un rapide monocoque de 46 pieds. Sur Imagine, on prend un ris, histoire de ne pas brutaliser le matériel. Nous restons deux jours dans Admiralty Bay, le temps de profiter une dernière fois de sa belle plage et du charmant village de Port-Elisabeth.

Navigation vers la Martinique

Nous quittons Bequia au petit matin le 3 février, suivi par Kadavu et Zed. Le canal de Bequia se montre clément cette fois, et nous atteignons rapidement la côte sous le vent de Saint-Vincent (on pourrait dire la côte sans le vent, car l'abri du relief nous en prive totalement). Nous rasons le rivage au moteur pour mieux admirer le paysage. Nous faisons un petit tour dans la petite baie de Wallilabou, où le film "Pirates de Caraïbes" a été tourné récemment. Les décors sont toujours là. Quelques boat boys nous accueillent sans agressivité, contrairement à leur très mauvaise réputation. Nous échangeons une bière fraîche contre quelques fruits, puis nous repartons le long de la côte.

La côte sous le vent de Saint-Vincent

A hauteur de Chateau Bel-Air, l'évènement tant attendu depuis le début de notre voyage se produit: nous pêchons notre premier thon!! Des poissons pourchassés s'étaient envolés juste devant nos étraves, et leur chasseur s'est laissé prendre à notre leurre qui traîne presque toujours dans notre sillage. Beau spécimen, 53 cm pour environ 6 kg, la bête a la peau dure, même notre super gaffe à crochet n'arrive pas à la transpercer. Finalement, j'attrape le fil au bout duquel il se débat désespérément et nous arrivons à lui bloquer la tête dans un seau. Au passage il m'éclabousse d'une belle giclée de sang et repeint le bateau en rouge ... âmes sensibles s'abstenir! On aurait pu se contenter de ce thon pour la pêche ce jour là. Mais alors que nous attaquons la traversée du canal de Saint-Vincent vers Sainte-Lucie toutes voiles dehors et marchons à 8 noeuds au près, nous entendons la canne partir par petits à-coups: un poisson est en train de goûter notre poulpe en plastique. Quinze secondes plus tard, le fil part pour de bon, si fort que je n'arrive pas à freiner le moulinet. On sent distinctement une odeur de brûlé, le fil est-il en train de fondre ?! C'est seulement après avoir ralenti le bateau à 3 noeuds qu'il devient possible de commencer à mouliner tant bien que mal, ça tire toujours très fort. Soudain, un aileron de bonne taille apparaît, nous avons attrapé quelque chose de gros et d'inhabituel (pour nous!). Requin ou espadon? Nous commençons à avoir un peu peur de nous faire tout casser. Nous apercevons enfin notre prise lorsqu'elle est assez proche ... c'est un marlin! A cette nouvelle, tout l'équipage est surexcité, et s'organise pour ne pas laisser échapper cette prise de choix. Bastien surveille les bateaux qui croisent dans les parages, Romain prépare tout le matériel (gaffes, crochets, seaux, cordages avec noeuds coulissants), Pascale finit de mouliner pour rapprocher la bête, et moi, je suis harnaché sur la jupe arrière, prêt au combat. Je plante le crochet de la gaffe dans la chair, et amène la tête du marlin sur la première marche. Il agite son rostre pointu comme une épée dans tous les sens, il faut faire attention à ne pas se faire transpercer, mais comment faire? C'est le poisson lui-même qui trouve la bonne idée: il mord la main courante et coince la mâchoire et le rostre de part et d'autre de cette poignée. J'en profite pour ficeler l'ensemble, puis nous réussissons à lui passer des cordages autour des ailerons et jusqu'à la queue qui est toujours dans l'eau.

Du coin de l'oeil nous surveillons les requins qui pourraient se ruer sur cette viande fraîche qui saigne abondamment. Un dernier effort et nous arrimons le marlin tête en bas sur la jupe. Dans l'eau, il nous paraissait mesurer dans les 1m30, maintenant nous estimons sa taille à 1m80. Quand on le remonte dans le cockpit, la mesure précise nous laisse rêveur: 2m01!!! Il est gigantesque. Son envergure aux nageoires pectorales est de 75cm, et après l'avis de tous ceux qui l'ont soupesé ensuite, nous homologuons son poids à 25kg. Après étude de nos livres, il s'agit plutôt d'un marlin blanc que d'un marlin bleu. Arrivés au mouillage sous les deux pitons de Sainte-Lucie, on se met au boulot pour préparer toute cette pêche. Heureusement, Kadavu est toujours avec nous, mais il nous faudra 3 heures avec l'aide de Geoffroy et de tous les enfants pour découper nos deux prises. C'est une véritable boucherie! Pascale et Yannick préparent les sashimis et les marinades de poisson cru, les sauces pour cuisiner les filets, Geoffroy fait griller les darnes au barbecue, et nous nous régalerons le soir même et les jours suivants.
Cette journée incroyable marquera à coup sûr nos mémoires... et dire que c'est Romain qui avait bricolé ce leurre magique, alors que je lui disais de ne pas y toucher parce qu'il avait été fabriqué par un vrai pro!


Pêcheurs pas peu fiers

Les apprentis bouchers
Le Carnet de Romain

Une super ... Non! une Mega-Pêche!!!

Le 3 février, alors que nous remontions vers la Martinique, nous avons fait une pêche tellement bonne que je ne sais pas si je peux la qualifier de miraculeuse!...Nous remontions donc vers la Martinique et nous longions la côte ouest sans vent de Saint-Vincent en traînant la ligne de pêche, avec, au bout, le leurre que j'avais "refait" et remis à neuf quelques jours plus tôt ... revenons donc au passé ... Si je me rappelle bien, alors que je remettais au leurre du câble et des couleurs, Papa me gronda sous prétexte que ce poulpe avait été fabriqué par un professionnel, et patati, et patata .... C'était donc aujourd'hui le jour où nous essayions le leurre pour la première fois. Tout à coup, nous nous sommes aperçu qu'un banc de poissons frétillait autour du bateau. Normalement si le leurre marchait bien, nous devions pêcher un poisson dans la seconde qui suivait. En effet je n'eus pas besoin d'attendre la seconde car c'est au moment même où j'y pensais que le fil se déroula. Au début, le fil a tiré assez fort, ce qui nous mit en joie à l'idée d'avoir un gros poisson accroché à l'hameçon.
"Alors tu vois qu'il marche mon leurre!" dis-je à Papa. Le poisson plongeait sans arrêt et nous n'arrivions pas à l'identifier. Pendant ce temps, Bastien criait aux "Kadavus" à la VHF que nous avions attrapé un gros poisson (j'ai oublié de vous dire que les Kadavus naviguaient avec nous). Le poisson se rapprochait du bateau sans que l'on puisse l'apercevoir. Soudain, Papa qui moulinait vit une tâche jaune qui réapparut plusieurs fois. Bastien et moi criâmes en coeur: "une coryphène!". Mais pourtant son comportement était très loin d'être celui d'une coryphène. Nous nous aperçumes alors que nous avions attrapé un thon!

Nous sautillions de joie sur le pont: c'était notre premier thon et nous en étions enchantés. Bastien reprit la VHF et cria aux Kadavus: "c'est un thon!!!" Charles demanda alors plus de précisions sur la bête (longueur, poids, et espèce) mais nous n'en savions rien. Il fallut d'abord le remonter (ce qui a été assez facile) pour donner toutes ces précisions:
       Poids: 6 kg
       Longueur: 53 cm
       Espèce: Albacore (poisson de la famille des thonidés ressemblant au "yellow fin tuna")
Nous étions tous contents de notre prise et nous prîmes une photo de ce petit exploit. Mais ce n'était rien comparé à ce qui nous attendait...

Une heure plus tard, alors que nous quittions les côtes de Saint-Vincent pour nous diriger vers Sainte-Lucie, et que nous avions toujours le poulpe, nous avons eu une touche. Petite au début; nous avons eu comme ça trois touches. Bastien disait au poisson derrière le bateau: "alors petit poisson, tu prends bien l'hameçon avec tes nageoires, et tu l'enfonces dans ta bouche" ... dzzzzzzzzzzz ... au moment même où il avait fini de dire ça, le poisson avait mordu! Papa alla tout de suite voir la canne: elle s'était tordue plus que jamais et le fil fumait et sentait le brûlé! Heureusement, le fil n'a pas cassé. Le poisson avait déroulé presque tout le fil et Papa n'arrivait pas à le bloquer avec le frein! Le poisson devait être énorme! On alla tous mettre les harnais de sécurité et je donnais le sien à Papa. Il commença à remonter le fil à l'aide du moulinet. C'était très très dur et Papa avait du mal. En plus, comme le poisson avait déroulé beaucoup de fil et qu'il tirait fort (même malgré la distance qui le séparait du bateau) nous avions peur que la ligne ne se rompe donc Papa devait attendre qu'il tire moins pour remonter du fil. Pendant ce temps, nous étions fous! Bastien criait (s'il ne hurlait pas) à la VHF à Kadavu qu'on avait attrapé un giga-mega-gros poisson; Et moi j'avais sorti tout (et je dis bien tout) ce qui pouvait servir à remonter ce géant (pour l'instant, nous ne savions pas encore ce que c'était car il était toujours hors de vue et sous l'eau ce qui faisait que les jumelles ne servaient à rien), c'est à dire: quasiment tous les bouts (ndrl: les cordages) du bateau, un maximum de couteaux (pour l'assommer), tous les seaux que l'on possédait et les deux crochets (un grand et un petit) que l'on avait et je me demandais même si il n'y avait rien d'autre à sortir. Quand il fut dans notre champ de vision, on a alors eu peur: on voyait sortir de l'eau une grande nageoire assez effilée qui ressemblait à celle d'un requin. De plus, sous l'eau, on voyait une grosse masse sombre. Alors Bastien et moi on a prié pour qu'il ne nous casse rien. Maintenant, ça me fait rire de repenser à ce moment où j'ai eu cette peur; Mais sur le moment, je ne rigolais pas du tout. Plus cet effroyable monstre se rapprochait, plus nous doutions que c'était un requin. En effet, nous avons commencé à voir apparaître un rostre puis le reste du corps de la bête qui était sur le côté, ce qui explique que l'on voyait une nageoire. En fait c'était un espadon !!!!! un marlin bleu pour être plus précis. Enfin, c'est ce que nous pensions, mais le poisson était en réalité un MARLIN BLANC, car le marlin bleu a une chair très mauvaise qui est presqu' immangeable, hors la chair de notre poisson était succulente. Mais revenons plutôt à la remontée du marlin. Donc, le poisson se faisait de plus en plus gros. Enfin, il fut juste derrière la jupe, et là, Papa a eu peur car cet énorme bête agitait son rostre devant lui comme une épée. Maman remonta alors un peu plus le fil, Papa put alors le gaffer et amener sa tête sur l'arrière de la jupe. A ce moment le marlin eut la bonne idée de mordre une poignée située près de l'échelle de bain. Papa prit donc immédiatement une corde et ficela la tête du poisson à la poignée, ce qui l'empêcha de remuer sa dangereuse épée, pendant que. Maman le maintenait grâce à la gaffe. Papa put ensuite l'attacher par la queue. Notre prise était maintenant bien ficelée. Bastien diffusait en hurlant des tas de détails sur le marlin par VHF.

Ensuite, on a attendu au moins une heure que la bestiole meure pour la remonter: on l'a alors soigneusement fixée au bimini et on a fait sa fiche d'identité:
       Longueur : 2 mètres
       Envergure: 75 centimètres
       Poids : 25 kg
Ensuite on s'est reposé de cette pêche fatiguante; puis on est arrivé au mouillage des deux pitons à Sainte-Lucie, notre escale.Une fois Imagine et Kadavu bien mouillés, les Kadavus sont venus nous voir, nous et notre poisson. Ils étaient très impressionnés: Charles, sur la pointe des pieds et les bras tendus, il n'était pas aussi grand que la bête. Ensuite nous l'avons dépecée et vidée: pour la vider, ça a été un peu dégoûtant car son estomac faisait 60 cm! Et il fallait plonger son bras entier dans l'estomac pour en retirer: foie, intestins, branchies et autres que je ne vais pas vous citer en détail.

Comme je vous l'ai déjà dit, le marlin a été succulent et il y en avait pour environ 15kg de nourriture; plus le thon! On en a fait en sushis, en grillades, en marinade, en cuisiné et en filets! On en a eu pour deux jours et on était onze personnes à en avoir bien mangé! ET TOUT LE MONDE S'EST REGALE !!!
Un grand merci au dieu de la pêche!

Le lendemain de cette orgie, le temps est redevenu maussade, et nous partons sous les grains vers la Martinique. En longeant la côte de Sainte-Lucie, un petit tour dans Marigot Bay nous console de ne pas avoir eu le temps d'y mouiller à l'aller: le site magnifique est maintenant trop aménagé et surpeuplé, c'est décevant. La traversée vers Le Marin en Martinique est assez sportive, au près dans 20 noeuds de vent, avec une mer forte et désordonnée. Le bateau passe très bien malgré tout, avec 1 ris dans la grand voile. A 15h ce 4 février, nous nous amarrons au ponton en compagnie de Kadavu.
Cela faisait un mois que nous n'avions pas été dans un port, allant de mouillage en mouillage, un mois de totale liberté et de vie au grand air, comme à parcourir les pages d'un catalogue de vacances de rêve, mais avec nous sur chaque photo ...

A suivre ...


Les photos des Grenadines: de Carriacou à Petit Saint-Vincent

Les photos des Grenadines: des Tobago Cays à Mayreau

Les photos de la remontée vers la Martinique