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La Gomera, par l'omnibus des îles Du 2 au 7 Novembre, Ile de La Gomera et arrivée
sur Gran Canaria On y va, on y va pas? On y a va! Après moultes hésitations nous quittons enfin Santa Cruz de Tenerife pour aller plus loin vers l'ouest visiter l'île de la Gomera. Il faudra peut-être se battre contre les alizés pour revenir ensuite à Gran Canaria, 100 miles plus à l'est, d'où notre hésitation. Mais l'envie d'île est toujours là, qui nous pousse à partir. Et puis tout le monde vente la beauté de cette île, et la gentillesse de ces habitants. Alors on y va, et on verra bien. D'autres choisissent de rester un mois dans la même île, nous c'est plutôt le style "omnibus des îles": on veut tout voir, tout visiter.
Ce que nous découvrons le lendemain matin sous
un beau et chaud soleil nous change radicalement de la grande ville de
Santa Cruz de Tenerife. Ici c'est plutôt l'ambiance village, paisible,
qui donne envie de prendre son temps. La Gomera est la deuxième
plus petite île des Canaries, et sans doute l'une des plus épargnées
par le tourisme de masse. Son relief est extrêmement abrupt, ce
n'est en fait qu'une succession de ravins escarpés qui descendent
d'un plateau central situé entre 800 et 1500 mètres d'altitude.
Les nuages de l'alizé, qui se promènent aussi à cette
hauteur, forment une mer de brume et fournissent une humidité constante.
Ce plateau abrite une relique végétale naturelle, la laurisilva,
ou forêt laurifère, classée au patrimoine mondial
de l' Humanité par l'UNESCO. C'est cette végétation
qui recouvrait le bassin méditerranéen avant que les glaciations
du quaternaire ne les détruisent. Les Canaries ont été
épargnées par le froid, et La Gomera est la seule île
de l'archipel qui n'a connu aucun épisode volcanique depuis cette
ère, ce qui lui a permis de conserver sa forêt intacte.
Il y a un petit marché sur la place de San Sebastian de La Gomera, où nous laissons s'exprimer notre penchant naturel pour les produits locaux. Aux Canaries nous avons découvert les papas, la sauce Mojo, le gofio, les fromages et le vin canariens, et bien apprécié la cuisine (à l'ail) en général. Les papas sont de petites pommes de terre toutes rondes, que l'on fait cuire à l'eau de mer et que l'on mange sans les éplucher, trempées dans le "Mojo". C'est une sauce à base d'ail et de piment, avec des variantes rouges ou vertes, douces ou fortes, et l'on s'est appliqués à en essayer le plus possible. Le gofio est une farine de maïs ou de blé complet torréfié, très riche en minéraux et vitamines que l'on utilise au petit déjeuner ou pour faire des desserts (mousse de gofio). Qui a dit que l'on perdait du poids en bateau ? La Gomera étant l'une des îles les plus
à l'ouest des Canaries, c'est naturellement un port de départ
pour la traversée, que ce soit vers le Cap Vert, le Sénégal,
ou les Caraïbes. Nous faisons nos quatrièmes adieux à
Génépi, que nous avons encore retrouvé ici, et qui
part pour le Cap Vert. Cette fois nous avons peu de chances de nous revoir,
car nous devons revenir sur nos vagues et rejoindre l'île de Gran
Canaria pour le départ de l'ARC. C'est une petite traversée
de 100 miles, normalement contre les alizés de nord-est, mais un
créneau météo s'annonce qui devrait nous éviter
de trop se faire secouer. Nous en profitons et quittons cette charmante
étape le 6 Novembre à midi. On ne voulait pas se faire secouer,
mais quand même pas à ce point là: le bateau est posé
sur un miroir, il faut se décider à mettre le moteur après
plusieurs heures sans bouger. Le vent se lève enfin, d'abord timidement en cherchant
sa route, puis carrément, 20 noeuds de nord. Il faut vite prendre
un ris, et on se retrouve au près bon plein à 10 noeuds.
L'ambiance est d'un seul coup complètement différente, ça
réveille. La houle n'est encore pas trop forte, le bateau bien
réglé, un régal malgré le froid et les averses
qui se sont invités sur notre coin de mer. Un autre bateau suit
une route parallèle à la notre, plus près de la côte.
Je le remarque parce que les bateaux vont plutôt d'est en ouest
par ici, et aussi parce que celui-la est un monocoque et il semble marcher
aussi vite que nous (j'avoue que j'ai toujours un bête esprit de
compétition qui reste enfoui quelque part). Je fignole un peu les
réglages, histoire de ne pas me faire dépasser. Mais le
bateau ne nous lâche pas et pendant 4 heures il ne fera que se rapprocher
de nous car il fait un cap un peu meilleur au vent. Lorsqu'il est assez
proche, il devient clair que nous n'avons pas affaire à n'importe
quel voilier. C'est un monocoque jaune vif, apparemment taillé
pour la course, sponsorisé par une société de télécom,
avec sept hommes d'équipage sur le pont. Romain me supplie de remettre
toute la toile pour les distancer (nous avons toujours un ris et tout
le solent), mais je résiste à la tentation et finalement
ce beau coursier finit par nous dépasser juste avant l'arrivée
sur Las Palmas. Pour satisfaire ma fierté, je me dis que l'on pouvait
effectivement aller au moins aussi vite avec toute la toile. Ce qui est
amusant c'est que nous retrouvons ce bateau à la pompe pour faire
le plein: il s'agissait en fait d'un bateau de course-croisière
de 18 mètres très affûté (un X-612, les connaisseurs
apprécieront), dont les équipiers viennent tourner autour
du catamaran et semblent un peu surpris à la découverte
de l'équipage qui leur a tenu tête si longtemps. A suivre ...
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